« Nous sommes des révolutionnaires malgré nous » de Bernard Charbonneau et Jacques Ellul
Bernard Charbonneau et Jacques Ellul sont deux penseurs de l’écologie politique dans les années 1930. Ils s’inscrivent dans le « mouvement personnaliste gascon », qui voulait proposer un contre-modèle au fascisme. Ils ont réfléchi à la question de la modernité, du progrès et de la technique.
Dans ce court ouvrage, il est présenté une compilation de textes. Ces textes sont considérés comme fondateurs de l’écologie politique français. Cette pensée peut être résumée de la manière suivante : le projet écologique ne passe pas par une prise de pouvoir, mais par la création d’une contre-société, basée sur d’autres valeurs et rapports au monde. Il faut donc changer notre rapport au monde pour changer notre société.
La thèse principale de cet ouvrage est une critique du progrès et de la technologie comme mouvement émancipateur, et propose que, contrairement à la pensée dominante de leur époque. Pour les auteurs, l’État, la science, le productivisme, la technique pouvaient être des instruments d’oppression en se retournant contre les humains.
Pour Bernard Charbonneau, le communisme, le fascisme et le libéralisme se ressemblent, car ces idéologies sont fondées sur l’idée de la production comme substrat du progrès. Derrière cette idée de progrès, il critique l’idée de gigantisme qui fait perdre le côté « taille humaine » : la Presse (avec un grand P), la Patrie comme idée abstraite, etc. Bref, Bernard Charbonneau vilipende une forme de progrès faisant perdre l’essence des choses, leur donnant un aspect mécanique et déshumanisé.
Ainsi, pour lui, le progrès, tel présenté actuellement dans nos sociétés, n’est qu’une complexification d’objets techniques. Or, les sociétés techniciennes ont tendance à réifier l’objet technique, en lui assignant un certain nombre de valeurs (la justice, la liberté, etc.). Pour lui, il faut se détacher de cette vision. En effet, cette réification donnerait une autonomisation à la technique. Le principal danger qu’il identifie, c’est que la technique, par définition, apporte plus de pouvoir et de destruction (en amplifiant nos actions : la bombe nucléaire peut détruire instantanément une ville).
La solution qu’il propose est que la technique doit être subordonnée aux fins, fins devant être définies aux aspirations profondes, notamment en prenant compte de la nature spirituelle de l’homme. Ainsi, l’objet technique ne doit pas être pensé en tant que tel, mais plutôt sur son utilisation, à ses fins, en prévoyant les conséquences.
CHARBONNEAU, Bernard et ELLUL, Jacques, 2014. « Nous sommes des révolutionnaires malgré nous »: textes pionniers de l’écologie politique. Paris : Éditions du Seuil. Anthropocène. ISBN 978-2-02-116302-5.