Pour de nombreuses personnes, une civilisation mondiale implique forcément une annihilation des autres cultures. J’ai envie de dire : impossible. Une civilisation mondiale ne pourra se faire qu'à la seule et unique condition sine qua non de l’unité dans la diversité. La grande Europe, celle de Monnet et de tant d’autres, est une Europe forte de sa diversité. Au contraire, un pays, quand il a essayé de détruire la diversité, perd de sa puissance et de sa créativité. On peut penser à la révolution culturelle chinoise, ou encore l’interdiction pendant très longtemps de parler patois dans les écoles françaises. Qui dit civilisation mondiale dit échanges mondiaux et donc enrichissement mutuel. Ces échanges ont donné le jazz par exemple. La culture mondiale peut-être une forme de syncrétisme aux multiples influences. Cela ne détruirait pas des cultures, au contraire, cela en créerait des nouvelles.

Ensuite vient le problème de la langue auxiliaire mondiale. La langue auxiliaire mondiale permet aux personnes de se comprendre et donc, par une connaissance de l’autre, d'abolir les préjugés. En soi, ce n’est pas quelque chose de négatif.

Le nœud du problème est de savoir : langue construite ou non ? Je dirais oui. Je suis en faveur de l’espéranto. Comme ça, il n’y aurait pas le côté où l’on impose une culture (en l’occurrence anglo-saxonne) mais cela serait une langue auxiliaire. Chacun apprendrait la langue de ses ancêtres mais en complément on apprendrait une langue universelle permettant à n’importe qui de se sentir chez soi n’importe où sur Terre. Il n’y aurait aucune négation de la culture mais au contraire, on l’enrichirait.

Un autre nœud levé est celui du Parlement mondial. Il faut un parlement élu réglant les problèmes mondiaux (frontières, réchauffement climatique, empêcher le retour de la guerre…). Mais il ne pourra se faire que sous quelques conditions : 1) qu’il soit fait dans un esprit d’unité et de bienveillance ; 2) où chaque peuple, chaque nation soit représenté d’une manière démocratique. Il faut que cette assemblée soit approuvée par le peuple et par le gouvernement pour éviter toute contestation. L’ONU était une bonne idée. Malheureusement elle a favorisé les vainqueurs de la Seconde Guerre Mondiale. La route est encore très très longue. Mais patience, l’humanité mûrit de jour en jour.

Oui, il est nécessaire d’avoir un gouvernement mondial, car les problèmes que l’on affronte le sont. Cependant, il faut inverser la pyramide des pouvoirs, car la véritable force d’action sur le terrain survient à la base. Les hautes institutions supervisent et, tel un aigle dans le ciel, nous indiquent la finalité du chemin (il faut aller d'un point A à un point B). À nous de construire le chemin.

Viens ensuite la question de l’identité européenne. Peu de gens se sentent européens, mais plutôt français, italiens, etc. par un égoïsme : la nation. La souveraineté nationale est un égoïsme très puissant, un nombrilisme. Laissez-moi vous citer Victor Hugo :

Un jour, espérons-le, le globe sera civilisé. Tous les points de la demeure humaine seront éclairés, et alors sera accompli le magnifique rêve de l’intelligence : avoir pour patrie le Monde et pour nation l’Humanité. Ne soyons plus anglais ni français ni allemands. Soyons européens. Ne soyons plus européens, soyons hommes. – Soyons l’humanité. Il nous reste à abdiquer un dernier égoïsme : la patrie.

Personnellement, je me sens appartenant à l’humanité. Je parle autant à des Belges qu'à des Algériens, Suisses, Américains, Africains. Pour moi nous sommes de la même famille. Je me sens plus Européen que Français : la France s’est construite grâce à l’Europe. Le mouvement humaniste est européen. Le mouvement des Lumières aussi. Les grands penseurs européens s’écrivaient entre eux.

Il vaut mieux ancrer l’identité de l’humanité. Mais cela passe par l’éducation. L’identité mondiale est salutaire pour l’humanité, car seul son unité (dans la diversité), permettra d’abolir la guerre et les dissensions.