Prise d’otage, vraiment ?

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Depuis ces derniers jours, on voit une grève généralisée en France : raffinerie, électricité, journaux… Bref, une bonne grosse mobilisation générale pour lutter contre une loi néolibérale. Sauf que les médias, en bons chiens de garde, disent que ces ouvriers « prennent en otage » les consommateurs.

Il faut savoir que tout ceci est un rapport de force. En effet, il s’agit que les dominants concèdent aux dominés un certain nombre de mesures. Généralement, dans ce genre de négociations, ça ne se fait pas en faisant un grand sourire et en demandant « s’il vous plaît, pourriez-vous, dans votre grande mansuétude, répondre à nos revendications ? » Si cela va dans l’intérêt des dominants, ils le feront. Si cela ne va pas dans leurs intérêts, ils vous répondront avec un grand sourire « faut pas rêver ! ». Tout cela est un rapport de force. Ça fonctionnera comme ça tant qu’on abolira pas, soit par un travail d’éducation et de prise de conscience pour une mutation du système, soit par une révolution permanente. L’emploi de « prise d’otage » est intéressant. Elle ne concerne que quand les dominés expriment une revendication, et ce de manière un peu forte. De toute manière, dit avec un sourire, on les écouterait pas et personne en parlerait. Donc, premier point, pour se faire entendre, il faut (malheureusement) crier. Second point, c’est qu’on parle jamais de « prise d’otage » (et dire qu’on utilise ce terme quelques mois après les attentats de novembre 2015, décidément, ça ose tout) quand on parle de dominants, par des lois liberticides par exemple. C’est facile de taper sur ceux qui peuvent pas se défendre.

Bref, tout ça est un rapport de pouvoir. Quand on a ni l’argent ni les médias de notre côté, il est difficile de se faire entendre. Dans le cas spécifique du travail et de la loi idoine, le salariat est en soi un rapport de force, en faveur du patronat. On pourrait résumer en « tu travailles pour moi, et en échange je te donne de l’argent. En cas de problème, je te licencie ». Le code du travail sert à rééquilibrer ce rapport de force, en donnant des outils au salarié, comme éviter des licenciements sans raison valable. Ainsi, le code du travail est à l’origine pour protéger le travailleur face à l’employeur.

Bien sûr, nombreux de nos acquis sociaux ne sont pas apparus comme ça. Il y a des personnes qui se sont battus pour les avoir, et surtout les conserver. Je vais citer quelques acquis sociaux. En les lisant, dites-vous « pourrais-je vivre décemment sans tel ou tel acquis ? », et réfléchir à deux fois avant de critiquer des personnes qui veulent tout simplement un rapport de force plus équitable.

  • 1803 : Jean-Baptiste Say, défend l’idée d’une instruction primaire obligatoire ;
  • 1848 : Sous la Deuxième République, décret du 2 mars limitant la journée de travail des adultes à dix heures à Paris et à onze en province ;
  • 1906 : Repos compensateur de 24 heures hebdomadaire sous un ministère Clemenceau ;
  • 1936 : Congés payés de quinze jours sous Léon Blum ;
  • 1950 : SMIG ancêtre du SMIC, créé sous la présidence de Vincent Auriol ;
  • 1983 : Retraite a 60 ans sous la présidence de Mitterrand ;